C’est, paraît-il, pour mettre fin au creusement des inégalités sociales dû au confinement des élèves, que M. Blanquer va rouvrir les établissements scolaire le 11 mai.
Pas tous, pas en même temps, pas pour les étudiants, peut-être en alternant les groupes et les semaines, peut-être avec des masques, peut-être sans, bon, rien n’est définitif, rien n’est obligatoire, rien n’est clair non plus, mais l’école doit rouvrir !
Les enseignants devront donc articuler travail présentiel et télétravail pour les élèves qui seraient absents, et donc avoir des articulations et des journées de travail très extensibles : le rêve de M. Blanquer ! l’enseignant.e corvéable à merci, contrôlable par le numérique, et l’enseignement à distance. Cette crise sanitaire lui permet en plus d’imposer ses réformes, notamment celle du bac et de la transformation du métier d’enseignant, alors qu’il se garde bien de mettre en place les mesures nécessaires pour un retour à l’école sécurisé dans la durée, à savoir des embauches massives de personnels titulaires, fonctionnaires, formés ou en formation continue, et en particulier dans les domaines médicaux et sociaux dont la quasi-totalité a été supprimée dans l’Education nationale ( médecins scolaires, infirmier.e.s, psychologues ). La crise montre pourtant le besoin d’en recruter d’urgence, mais de tout cela il ne veut rien entendre.
il fallait les renvoyer au travail
L’argument social, si émouvant, laisse à penser que les établissements implantés dans les zones populaires seront les premiers concernés par la réouverture. Et cela tombe bien : parmi les ouvrier.e.s, 55% étaient à l’arrêt, le plus souvent avec le chômage partiel. Les laisser ne rien faire était insupportable, l’économie souffrait trop ! il fallait les renvoyer au travail. Bien sûr il y a le risque de contamination dans les transports en commun ou sur le lieu de travail, bien sûr il y a la pression patronale, mais comme les parents pourront choisir de mettre ou non leur enfant à l’école, leur bébé à la crèche, ils pourront choisir aussi d’aller travailler ou non ( avec un fort risque de licenciement à la clé ) mais ce sera bien sûr leur choix… Et donc l’Etat ne sera ni responsable de leur contamination ni des éventuels décès. En affirmant que l’école reprendra le 11 mai mais qu’elle n’est pas obligatoire le gouvernement fait reposer sur les familles la responsabilité de la lutte contre la pandémie, à chacun de choisir s’il prend le risque d’être contaminé ou pas ; mais, bien sûr, le gouvernement sait que beaucoup n’ont absolument pas le choix.
Les tests ne sont pas encore suffisants
Le Pr Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l’Institut Pasteur, le dit d’ailleurs simplement : « Il fallait organiser la transition vers un retour à l’activité, y compris (sic) pour des raisons sanitaires. La clé c’est d’être prêt sur le plan logistique avec les bons tests, la bonne appli de traçage, l’adhésion de la population, des services de réanimation désemplis…Mais on devait se jeter à l’eau. » Les tests ne sont pas encore suffisants, la bonne appli est à l’étude, les lits de réanimation devraient être à moitié libérés vers la mi-mai selon des projections, l’adhésion de la population est loin d’être gagnée, mais pour contribuer à l’immunité de la population, pour le bien-être de l’Economie et le bonheur du Capital on se doit de se jeter à l’eau, au risque d’être submergé par la nouvelle vague de contamination. Enfin, tout le monde ne se jettera pas à l’eau. Pas ceux qui savent nager.
Gisèle MALAVAL