Aragon, journaliste à Ce soir en 1938*, explique d’une plume magnifique la trahison de la France vis-à-vis de l’Espagne républicaine, trahison qui s’appelle « non-intervention », « ce mot mensonger, destiné à couvrir un crime. » Cette politique honteuse n’était que la continuation des accords de Munich, cause première de la guerre, ce que Churchill avait aussi fort bien ciblé.
La Tribune de l’Aube, journal dirigé par la droite auboise, vante à cette époque les mérites de tous les dictateurs au pouvoir ou en puissance. Elle titre chaque jour « Mon ami Franco » et désigne un nouvel ennemi qui vient « d’envahir » la France ; l’Espagnol rouge, chassé de son pays par le coup d’état, qui apporte avec lui « les maladies et les idées dangereuses. » Le capitalisme à force de jouer avec le feu fasciste lui a laissé partout le pouvoir.
Aujourd’hui, l’Europe et nos sociétés sont bien différentes. Certes, le fascisme se nourrit encore de l’immigration et l’extrême-droite gangrène les consciences. Mais on voit bien qui, par derrière, manipule son audience et tient haut le curseur. C’est le capitalisme le véritable danger, son fonctionnement, ses ravages, ses représentants au pouvoir en Europe. Dans les élections, il n’y a pas compétition entre Macron et Le Pen, comme on veut nous le faire croire, mais entre ceux qui souffrent de leurs maigres ressources et les forces du capital qui veulent les soumettre davantage à leurs lois.
Oui, il faut combattre le racisme, maladie terrible des démocraties, mais aujourd’hui, surtout ceux qui s’en accommodent et s’en servent.
* Les Annales n° 20 de la Sté des Amis d’Aragon et d’Elsa Triolet