Avec 295 tonnes vendues en 2016, l’Aube était le premier département de France consommateur de chimie agricole. La récente condamnation de Monsanto devrait conduire le pouvoir à revoir sa copie de complaisance avec les géants de l’agrochimie.
En 2016, 8 000 tonnes de glyphosate ont été vendues en France.720 000/an dans le monde par 90 chaînes pétrochimiques.
Le tribunal de San Francisco a condamné, le 10 août, la firme chimiquière à verser 289 millions de dollars à un jardinier américain atteint d’un cancer. Bayer, qui a racheté en juin, pour 63 milliards de dollars, Monsanto et a illico annoncé la supression de cette marque, est sorti de son trou... parce que son action a baissé de 10%. De la compassion pour celui qu’ils ont empoisonné à son insu, point. La médiatisation de cette bataille entre David et Goliath a déjà eu pour effet d’augmenter le nombre de plaintes contre le géant de l’agrochimie. Pied de nez à Monsanto ? Un prochain procès s’ouvrira cet l’automne à Saint- Louis dans le Missouri, la ville de naissance de l’entreprise qui a fabriqué l’agent orange.
Macron cultive le flou...
Face aux enjeux, la firme, lobbyiste de grande envergure, entend mener le combat jusqu’au bout. Mais la lourde condamnation prononcée par le tribunal américain relance un débat brûlant de notre côté de l’Atlantique : ne faudraitil pas enfin interdire au plus vite le glyphosate, principe actif du Roundup de Monsanto, classé « cancérogène probable » par l’Organisation mondiale de la santé ? Car si la décision US n’aura aucune conséquence en Europe comme en France d’un point de vue juridique, d’un point de vue politique en revanche, il devient de plus en plus difficile pour les institutions européennes et françaises de n’en tirer aucune conséquence. À l’échelle européenne, l’autorisation de cet herbicide, le plus vendu au monde, a été prolongée pour cinq ans fin novembre. Cette autorisation est renouvelable et sera à nouveau étudiée en 2023. En France, Emmanuel Macron cultive le flou. S’il a promis que ce produit serait interdit dans l’hexagone « au plus tard » à fin 2020, il a ajouté aussi sec que sa décision dépendra « des alternatives [qui] auront été trouvées ». Feignant d’ignorer que lesdites alternatives existent déjà.
Intérêts économiques contre santé publique
Il ne s’agit pas de remplacer une molécule par une autre, mais plutôt de repenser les systèmes de cultures. Pourtant, le gouvernement continue de lâcher du lest à l’agrochimie, répétant à qui veut l’entendre l’engagement d’interdiction du produit « dans ses principaux usages », mais s’autorisant cinq ans avant de l’interdire « pour tous les usages ». En attendant, rien n’a été acté nulle part. Des amendements au projet de loi agriculture et alimentation visant à graver dans la loi l’engagement présidentiel de sortie en trois ans ont été rejetés en mai par les députés. Le ministre de l’agriculture, Stéphane Travert, s’y était opposé... avant de promettre en juin une proposition de loi sur ce sujet, si aucune avancée n’est visible « au terme des trois ans ». Le secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement, Christophe Castaner, a lui fixé une échéance à dix-huit ou vingt-quatre mois. Le glyphosate est donc toujours autorisé en France, même s’il fait l’objet de restrictions de vente et que la loi sur la transition énergétique de 2015 prévoit son interdiction dans les jardineries à partir du 1er janvier 2019. Pourtant, l’interdiction du totale du glyphosate était une promesse électorale d’Emmanuel Macron. Dans ce dossier, ce sont une fois encore les intérêts économiques des multinationales qui prennent le pas sur la santé publique, l’environnement ou la qualité de vie, et qui poussent à la roue d’une agriculture productiviste ; un gisement de profits considérables au sommet de la pyramide capitaliste