Les observations de la science qui étudie le compor tement animal,
l’éthologie, nous ont amplement montré l’ineptie de notre
vision du monde animal. Les manifestations du compor tement
des abeilles, fourmis, dauphins, corneilles, pieuvres, etc., nous
révèlent l’existence de formes d’intelligence animale stupéf
iantes. De même, la notion de méchanceté, at tribuée à certaines
espèces animales (tigres, crocodiles, etc.), est totalement
déplacée et n’a rien à voir avec la méchanceté manifestée par
les humains : tor ture, oppression, sadisme. L’essayiste anglais
George-Bernard Shaw a écrit : « Quand un tigre tue un homme,
on crie à l’horreur ; quand un homme tue un tigre, on parle de sport. »
Grâce à Darwin, nous savons que nous sommes, nous-mêmes,
des animaux. Et en fait, nous sommes les seuls à pouvoir manifester
de la cruauté, de la cruauté « bestiale ».
La semaine dernière, une journaliste hongroise appar tenant à
une chaîne de TV par internet, proche du par ti d’extrême droite
Jobbik, f ilmait à la frontière serbo-hongroise des réfugiés tentant
d’échapper à la police. Jugeant probablement ces derniers
trop mollassons, on la voit, sous l’oeil de la caméra d’un autre
repor ter, d’abord savater une f illette puis faire un croche-pied
à un homme por tant un enfant dans ses bras*. Elle a révulsé le
monde mais n’éprouve aucun remord. Pire, elle persiste et signe
en concluant un message sur son prof il Facebook par « Heil ».
Que faire face à la haine qui s’exhibe aujourd’hui sans retenue,
face à la cruauté bestiale chauf fée à blanc par la bêtise ?
« Il y aurait encore des coups de guillotine à donner », m’a-t-on dit
à ce sujet. Quand le combat “argument contre argument” relève
des douze travaux d’Hercule, la tentation est for te, en ef fet, de
suivre Hannah Arendt qui estimait que les nazis ont été battus
par les armes et pas par les arguments.
* La vidéo est sur le site de l’ADIRP de l’Aube :
http://adirp10.unblog.fr
à la vue de la photo du petit Aylan, Arno Klarsfeld
s’est surpassé sur Twitter en demandant s’il était « raisonnable
de partir avec deux enfants en bas âge sur
une mer agitée dans un frêle esquif ». On se saurait
trop lui conseiller de réfléchir à son histoire familiale.